mardi 27 février 2007

2006, l'année de la gamellisation




Encore une fois en 2006, la BD se porte bien puisque tout est en augmentation de partout et qu’il suffit de compter... Il y a de plus en plus en plus d’albums dans les librairies et de plus en plus en plus de clients qui ne les achètent pas. C’est ça la gamellisation, et ce n’est qu’un début, rangez vos livres et sortez vos calculettes.



- Gamellisation de la production
Cette année encore, la production est en augmentation puisque les nouveautés 2006 sont plus nouvelles aujourd’hui que les nouveautés 2005. On constate aussi que de plus en plus en plus d’albums sont présents en librairie sur une période de plus en plus en plus limitée et sont remplacés par d’autres selon un mouvement de plus en plus en plus rapide. On en conclut que tout est de plus en plus en plus nouveau.

- Gamellisation de l’édition
Toujours plus d’éditeurs (ils sont plus nombreux qu’en 2005 puisque s’y ajoutent les nouveaux) ont publié des BD en 2006 : 100 % des albums ont été édités par 100% d’entre eux, ce qui est la preuve de la bonne santé du secteur.

- Gamellisation de la manutention-BD
La rotation d’ensemble de la production étant de plus en plus en plus rapide, cela induit une augmentation de la manutention à tous les endroits de la chaîne selon le circuit suivant : imprimeur - transporteur - distributeur - transporteur - libraire - transporteur (retour) - distributeur (stockage) - transporteur (retour) - éditeur (retour). Sur le marché de la bande dessinée, c’est donc les transporteurs qui progressent. Saluons le magnifique travail de cette profession. Grâce à elle, la production BD est de plus en plus en plus mobile.


- Gamellisation de la pérennité d’ensemble
On envisage une probabilité de 99,999% pour que la production 2006 soit oubliée rapidement et n’entre pas dans l’histoire de la bande dessinée. Le taux d’oubli post-lecture est un nouveau critère d’évaluation en cours de validation qui promet de jolis calculs pour les années qui viennent.

- Gamellisation des nouvelles collections
De nombreuses collections ont vu le jour cette année — et sont mortes cette année. Ce nouveau phénomène est précipité par l’intérêt et la curiosité du public, qui au fond n’en rien à foutre des nouveaux noms, des nouveaux projets, des nouvelles déclarations d’intention, nouvelles chartes graphiques, nouveaux labels, ou encore nouveaux meubles-présentoir. De petites polémiques et quelques bruissements de forums sont à signaler.

- Gamellisation du lectorat potentiel
De plus en plus en plus de lecteurs potentiels passent devant les librairies spécialisées sans s’arrêter. De plus en plus en plus de lecteurs potentiels s’arrêtent juste pour regarder la belle vitrine aux couvertures d’albums colorées. De plus en plus en plus de lecteurs potentiels entrent juste pour acheter une grosse merde qu’ils ne liront pas mais offriront à leur cousin prof, rugbyman, vrp, cycliste, gendarme, pompier, qui dira merci en souriant. De plus en plus en plus de lecteurs potentiels disent merci en souriant, et demeurent potentiels.

- Gamellisation des métiers de la BD
Les avances sur droit sont de plus en plus en plus maigres, de plus en plus en plus d’auteurs de BD ont de plus en plus en plus de problèmes financiers et se gamellisent socialement. De plus en plus en plus de dessinateurs et de scénaristes diversifient leurs activités professionnelles et s’orientent vers le marché des fruits et légumes, ou aussi l’enseignement où le public est captif à 100%. Enfin, pour une proportion importante d’entre eux, 2006 est l’année de la clochardisation.

- Gamellisation de la culture BD
Le taux de respectabilité du 9e Art est inversement proportionnel au pourcentage de grosses merdes éditées, ce qui fait une belle division dont voici le résultat: le taux de respectabilité du 9è Art (j’emploie le terme de 9e Art seulement ici, à propos de respectabilité, c’est le moment où jamais, mais j’aime bien la bédé) atteint le chiffre infinitésimal de 0,000000000000000000000000000000000001%. C’est une bonne nouvelle pour tous les marchands et aussi pour certains créateurs qui sauront en profiter dans l’ombre.

- Gamellisation des médias
De plus en plus en plus en plus de médias parlent de BD et aussi de plus en plus en plus de sites internet se consacrent à notre marotte de prédilection préférée. De plus en plus en plus de journalistes BD disent du bien de la BD et sont de plus en plus en plus gentils. De plus en plus en plus de journalistes gentils aiment interviewer des dessinateurs bavards. De plus en plus en plus de dessinateurs bavards aiment dire du bien d’eux-même à des journalistes gentils. De plus en plus en plus en plus de dessinateurs dessinent vite pour pouvoir vite bavarder avec de plus en plus en plus en plus de journalistes gentils qui écrivent vite des articles de plus en plus en plus en plus en plus gentils et de plus en plus en plus en plus en plus en plus bavards. De plus en plus en plus en plus en plus en plus en plus en plus de journaux BD gentils et bavards se retrouvent au pilon.

Mais rien ne peut entamer ma bonne humeur comptable, et même si tout se gamellise, j’aurai toujours une bonne pâtée de chiffres dans ma gamelle.

Gilles Ratelier,
de plus en plus en plus
secrétaire de l’ACBDBDBD






6 commentaires:

Li-An a dit…

Dans les gamellisations, il y a aussi de plus en plus de jeunes auteurs à tenter de se faire publier. Ce qui nourrit bien la machine. Accessoirement, il parait qu'en France, on publie bien moins de livres qu'en Allemagne ou en Angleterre. La gamellisation est donc un phénomène qui ne risque pas de s'arrêter de sitôt.
Ce qui est dommage, ce que le post ne cherche pas à réfléchir sur les divers mouvements internes de gamellisation. Et quid du manga :-) (ou alors la gamellisation n'a que faire des éstrangers ?).

SydN a dit…

ouais, la mangamellisation!

Sinon, super sexy la photo du camionneur!

Anonyme a dit…

ça alors, on dirai presque un camionneur de Picardie !

pifou a dit…

Ou pour ceux qui boivent du Banga, la Bangamellisation !

Anonyme a dit…

hahahaha! Génial!

Anonyme a dit…

Mais qui de la "baguettisation", l'invasion de la bédé par de bonnes valeurs franchouillardes à base de Bigard et de Shirley et Dino ?