vendredi 4 janvier 2008

2007, l'année de l'adaptation



Le mouvement de fond caractérisque de l’année qui vient de s’écouler tient en un mot : adaptation. Adaptation littéraire, cinématographique, télévisuelle, médiatique, adaptation financière, adaptation aux lois du marché, au goût du public... tout est bon dans l’adaptation, surtout quand on sait compter ! A ce propos, reportez-vous au rapport 2006 qui est en tout point adaptable au présent compte-rendu. Il n’y a qu’à ajouter quelques “plus”. On peut même dire que la bande dessinée s’était adaptée en avance à la nouvelle donne politique menée par notre nouveau président adoré. Publier plus pour pilonner plus, c’est la règle d’or qui gouverne tout le secteur depuis l’équivalent de presque deux quinquénats !

1) Adaptation aux plus gros tirages
En 2007, la bande dessinée a continué son chemin vers la progression et l’augmentation, comme les années précédentes. Le plus est la valeur montante de la bande dessinée d’aujourd’hui, et assure une bonne reconnaissance du medium, plus encore que tous les palmarès ou les débats élitistes des spécialistes. Pour faire un vrai palmarès, incontestable et significatif, il suffit de l’adapter aux plus gros tirages. Voici donc les sélectionnés pour le prix “Plus” du meilleur leader du marché 2007 :
- les 2 derniers albums de “XIII” de Van Hamme, l’un avec Giraud, l’autre avec Vance (550 000 ex. chacun)
- “Largo Winch” de Van Hamme et Francq (455 000 ex.)
- “Le petit Spirou” de Tome et Janry (415 000 ex.)
- “Astérix et ses amis” collectif hommage à Uderzo (400 000 ex.)
- “Kid Paddle” de Midam (380 000 ex.)
- “Boule et Bill” de Verron (350 000 ex.)
- “Le Chat” de Geluck (320 000 ex.)
- “Lanfeust des étoiles” d’Arleston et Tarquin (300 000 ex.)
- “Thorgal” de Sente et Rosinski (250 000 ex.)
- “Quatre ?” de Bilal (240 000 ex.).
Ce classement des plus gros tirages a été établi par mon confrère et presqu’homonyme Gilles Ratier dans son rapport 2007, et il démontre le caractère irréfutable des prix “Plus”. Ils sont fondés sur un critère objectif qui évite au jury de délibérer dans l’approximation. Il n’est même pas besoin de lire la sélection pour en choisir le lauréat, car le vainqueur, si l’on applique l’implacable logique des chiffres, est déjà premier.

2) Adaptation à tous les contenus culturels
La bande dessinée pratique de plus en plus l’adaptation. Elle adapte les œuvres littéraires. Elle adapte des chansons. Elle s’adapte au cinéma. Elle s’adapte à la télévision. Elle s’adapte aux jeux video et à tous les nouveaux médias. Elle adapte même des causes humanitaires. Enfin, et surtout, elle s’adapte elle-même constamment par le plagiat, la contrefaçon et la récupération joyeuse, divertissante et pasteurisée. Par là même, elle cherche à s’adapter au goût du public, ce qui est le but ultime, vous en conviendrez.

3) Adaptation à la loi du marché
Désormais, on ne dit plus “éditeur” mais “opérateur”. Enfin, seulement pour ceux qui publient (pardon : produisent) beaucoup et donc m’obligent à faire plein d’opérations arithmétiques. Les autres, ceux qui publient peu (ouh la honte), nous les nommerons dorénavant “petits trucs”. Pareil pour les livres qui vendent beaucoup : on les appelait “séries” (j’aimais bien), maintenant il faut dire “marque”, c’est plus dans la tendance du marché. On peut étendre ce concept aux auteurs, puisque certains d’entre eux sont plus connus que ce qu’ils publient ! Ainsi, il y a les marques Mœbius, Bilal, Tardi qui marchent très fort en magasin.

4) Adaptation aux niches
On remarque aussi que de nombreux opérateurs s’adaptent aux niches. Il n’y a pas de petit profit et la niche est un petit placement sans risque que l’on peut faire grossir après l’avoir bien pénétrée. De plus, pénétrer une niche est très agréable, et médiatiquement valorisant, surtout pour les vieux opérateurs.

5) Adaptation des auteurs morts
En 2007, des auteurs sont morts. Hélas, trois fois hélas, malgré la bonne santé du secteur, quelques vieux créateurs nous ont quitté. Pourquoi ont-ils fait cela alors que tout allait si bien ? Heureusement, ils seront bien punis car face à la vitalité du marché et au taux de rotation accélérée des livres d’auteurs vivants, les quelques rééditions de livres d’auteurs morts passeront inaperçues.

6) Adaptation des auteurs vivants
Quelques créateurs réussissent à vivre de la bande dessinée, même s’ils ne sont pas des marques. Au milieu de cette bataille de titans, et de ce déluge de profits astronomiques, certains auteurs réussissent à gagner un peu. On ne peut que s’en réjouir. C’est incroyable de voir que ces humains, moins armés financièrement, ne possédant ni portefeuille d’actions, ni comptable professionnel, ni chiffre d’affaire annuel, réussissent à grapiller parfois quelques revenus de leur petite activité solitaire, et ceci MALGRÉ LA BONNE SANTÉ DU SECTEUR !

C’est une source d’optimisme pour les années à venir et pour mes prochains rapports annuels..


Gilles Ratelier,
de plus en plus en plus
secrétaire de l’ACBDBDBD






14 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est plutôt triste votre constat.

Anonyme a dit…

Ha ha ha ! Mais non, ce n'est pas triste, voyons ! Vive l'adaptation ! (ça s'appellait pas la collaboration à une époque ?)

Anonyme a dit…

C'est scandaleux ! Je revendique les conclusions de ce rapport telles qu'annoncées en mars 2007 ("D’une façon plus générale, l’adaptation de littérature va être une des grandes tendances à partir de cette année en bande dessinée et il faudra voir ce qui va en sortir. J’espère qu’on ne va pas transformer de grands textes romanesques avec les aspects les plus infantilisants de la bande dessinée...") sur le site Du9, là : http://www.du9.org/Six-Pieds-Sous-Terre.
Cher monsieur Ratelier, vous m'avez adapté (certes avec talent) pour faciliter vos propres conclusions, celà ne vous honore pas...

Anonyme a dit…

J'ai entendu dire que Persepolis allait être adapté en bande dessinée.

Anonyme a dit…

Par qui ?

GROSPATAPOUF a dit…

Monsieur 6P, vous n'avez pas le monopole de l'adaptation. Le principe même de l'adaptation est la négation de l'antériorité et de l'authenticité de l'œuvre. Votre auto-citation revendicatrice prouve donc que vous n'avez rien compris à l'adaptation, et votre indignation est d'un autre âge.
Je ne vous salue pas, monsieur.

Li-An a dit…

Je conteste vaguement la place de Moeb à côté de Tardi ou Bilal. Si on ne peut pas nier la volonté de tout le monde de faire de "Moebius" une marque, l'auteur en premier, elle n'est pas du tout à caractère populaire, il n'y a qu'à voir les chiffres de ses albums persos sous ce pseudo (Inside Moebius).
Par contre, il a été très intéressant de voir que l'adaptation de XIII a été annoncée "par Moebius" alors que c'est signe Giraud. Moebius est devenu une marque qui ne vend pas au grand public mais à des acheteurs connaisseurs et fortunés. Une sorte de marque de haute couture BD...

GROSPATAPOUF a dit…

Sinon, Monsieur, Li An, ça va pour vous l'adaptation ?

Anonyme a dit…

Bonne année à la BD !
Quoi ? J'ai dis une connerie ?

Anonyme a dit…

Monsieur Pas... heuu Patapouf, si vous écrivez vos articles aussi vite que vous lisez les commentaires affèrants, on comprends soudain bien des choses. Je parlais bien sur de l'ANNONCE de 2007 comme "année de l'adaptation". Revendiquer le principe de l'adaptation ? Et pourquoi pas revendiquer le pastiche du discours critique, tant qu'on y est...
Quant à votre "définition" négativiste de l'adaptation, si elle s'applique effectivement assez bien à votre article, elle demeure aussi bien légère, historiquement, pour le monde des arts. Le manifeste rend gorge face à l'Histoire, la foi naïve d'un art narratif sans cesse tourner vers une définition -floue- de la nouveauté épouse autant l'esprit du temps qui nous gouverne que les marchands d'idées dont le journaliste, même paré des oripeaux de l'esprit critique, n'est pas la cinquième roue du carrosse.

Anonyme a dit…

L'adaptation est nécessaire, le progrès l'implique.

GROSPATAPOUF a dit…

Monsieur 6P, ne vous énervez pas trop, on n'est pas sur actua-bd ici.
Tout d'abord, il ne s'agit pas ici d'un manifeste, mais d'un modeste compte-rendu de l'année écoulée, il est donc tout à fait inutile de l'accuser de refléter l'air du temps puisque c'est précisément son objectif, ni de lui reprocher son caractère rétrospectif en nous accusant de reprendre vos idées, puisque, je le redis, il s'agit d'un BILAN. Puisqu'il se trouve que nos conclusions reflètent vos prédictions, vous n'avez qu'à vous en féliciter, au lieu de vous indigner. De notre côté, nous nous en réjouissons.
Vous vous flattez d'être visionnaire (à court terme), très bien, alors parlez-nous de 2008, mais dépêchez-vous, le temps passe vite, monsieur !
D'autre part, je vous signale que "l'article afférant" est signé Gilles Ratelier, ce n'est donc pas moi qui l'ai écrit, soyez aussi de votre côté attentif à ce que vous lisez.

Anonyme a dit…

Mais je ne m'énerve pas, bien au contraire.
Et j'ai bien saisi qu'il s'agissait d'un bilan, d'ailleurs le mot "manifeste" se situe dans la phrase suivante, en micro-prolégomène lié à l'idée de "foi naîve" de la nouveauté nécessairement créatrice (lisez aussi les points)et qui s'applique à votre définition cise au commentaire suivant. Je n'accuse d'ailleurs pas vraiment Monsieur Ratelier de me plagier mais juste de m'adapter, belle figure de démonstration qui tel le chat ou la tartine retombe toujours sur ces pattes - oui, une tartine peut aussi avoir des pattes.
Effectivement, l'article est de Monsieur Ratelier, mais comment voulez faire passer l'idée
de "M. Pas... Patapouf" avec Ratelier ? Ras... Ratelier ? Mais ça ne marche pas !!
Ha, 2008 ? Attendez, je consulte mon ornithorynque...
Hummm... ho mon Dieu !! C'est tout bonnement incroyable, figurez-vous que le club Soleil monte dans le top 14.

SydN a dit…

"Ainsi, il y a les marques Mœbius, Bilal, Tardi qui marchent très fort en magasin."

> et n'oubliez pas les figurines Manara disponibles chez votre marchant de journaux :)